Les hommes se sont finalement développés, ils vivaient dans une cité géante en paix, la maladie frappait rarement, on rendait la justice par la prison et le sang. Les dieux étaient convenablement honorés. Jusqu’à ce que la curiosité ne l’emporte sur le reste. Aucun homme n’a souvenir de ce qu’était le monde avant le déluge, aucun homme ne sait ce qu’est le déluge. Celui qui divisa les hommes sur différentes régions totalement isolées avec une langue par région, différentes idéologies, différentes coutumes.

Cela fait suite à leur trop plein de curiosité, lorsque les érudits ont demandé aux bâtisseurs de construire une tour qui leur permettrait d’atteindre le ciel puisque les dieux résidaient dans les cieux. Mais dès que le chantier fut lancé, les dieux s’aperçurent immédiatement de ce qu’ils faisaient. Tous furent unanimes sur la sanction à appliquer : la séparation des peuples. Pour ce faire, chaque dieu eut le droit de choisir un héraut, un représentant qui descendrait sur terre pour séparer le monde. Certains dieux choisirent des humains qui avaient réussi de grandes quêtes et les rendirent immortels, d’autres les façonnèrent de toute pièce.

Les hérauts durent séparer l’unique continent en plusieurs, ouvrir de nouveaux océans, faire naître d’imposantes montagnes et des volcans, créer d’impénétrables et hostiles forêts, des gouffres sans fin, des mers d’acide, des grottes qui étouffent toutes les lumières. Les artifices furent nombreux et beaucoup d’humains périrent afin de limiter pendant un temps leur développement, pour la période durant laquelle le monde changeait.

Dès que les hommes furent séparés, les dieux modifièrent les langages des hommes, leur façon de penser, la paix était un fragile équilibre, les hommes se réunirent en plusieurs cités, souvent jalouses de leurs voisines. Les humains encore trop curieux mouraient lorsqu’ils dépassaient les frontières, à cause des plantes mangeuses d’hommes, les insectes aux piqûres venimeuses, les sables avaleurs, les grottes sans fin, les éruptions de lave, le soleil qui brûlait leur chair, la pluie acide qui faisait fondre leur peau et bien d’autres horreurs.

Depuis que les hommes sont confinés dans différentes régions, ils ont appris à se reconstruire, mais tous ont oublié la séparation de leur peuple et ce qu’il y avait avant.

La région d’Oroste s’est développée avec trois cités-états qui exerçaient chacune un contrôle différent sur la région. La cité militariste de Fiéroc menaçait par le Sud ses voisins grâce à ses techniques martiales de pointe, sa région très peuplée avec une imposante agriculture. À l’Est, les sciences et la culture étaient les armes de Calmlivr, elle disposait d’un avantage technologique certain et ses collections culturelles et religieuses permettaient de se protéger des assauts et de combler ses lacunes commerciales et militaires. Sur les côtes de l’Ouest, Bayenmer rayonnait par son savoir économique, son réseau de marchands qui rendait les autres cités-états légèrement dépendantes de la fortune de la ville côtière. Les tensions sont vives entre les cités-états, chacune souhaitant dominer la région d'une façon différente.

On peut toutefois considérer cette chronologie avec le détail de certains événements.

- An 0 : Séparation des hommes, naissance d’Oroste

- An 3 : Création des cités de Fiéroc et Bayenmer - Il s’agit des deux premiers regroupements opposant les militaristes aux pacifiques, chacun s’opposant dans un environnement différent entre les bords de mer et les montagnes.

- An 10 : Création de Calmlivr - Une partie des habitants de Bayenmer décide de s’enfoncer dans les terres en raison d’une dissonance. Les économistes pensent que le savoir se marchande, s’achète et se commande, ce qui ne convient pas aux hommes d’arts et de sciences qui réfutent cette idée de leurs méthodes comme de l’artisanat basique.

- An 12 - 15 : Guerre des frontières - Trois années de guerre forcent les trois cités à s’affronter pour délimiter les territoires, une alliance entre Bayenmer et Calmlivr détermine déjà leur répartition territoriale et la coalition maintient en statu quo Fiéroc sur une ligne de front avancée en raison de la rapidité fulgurante des troupes. A force de combat, la ligne recule et permet de fixer l’actuelle frontière avec un traité signé par les trois cités.

- An 16 : Création des cinq grandes guildes - Les guildes des artisans, artistes, combattants, éclaireurs et érudits s’érigent sur la région et permettent de créer une nouvelle force géopolitique pour contenir les ambitions des trois cités en plus de permettre la formation, l’épanouissement et le regroupement de chacun par ses affinités.

- An 28 - 30 : Création des guildes des assassins et des inquisiteurs - A une période où de grandes familles sont rivales et cherchent à obtenir des terres et certaines faveurs, deux groupes naissent par leur opposition. La guilde des assassins vient obéir par cupidité à certains ordres alors que la guilde de l’inquisition vient s’assurer que nul ne blesse ou ne blasphème les dieux.

- An 85 : Les grands cataclysmes - Pendant l’hiver, tout s’est transformé suite à quelques initiatives des cités afin d'explorer “au-delà”. Si usuellement quelques imprudents partaient seuls, ici, chaque cité partit dans une course à la découverte en envoyant plusieurs centaines de personnes en exploration. Les dieux, offensés firent en sorte que les volcans crachèrent leurs flammes, carbonisant les explorateurs de Fiéroc, les imprimant sous les cendres. Les bois proches de la frontière de Calmlivr moururent, transmettant d’horribles maladies et déformations. La mer se scinda en deux eaux, celles claires pour la pêche, puis les eaux noires d’où personne ne revint et fit échouer tous les navires en des épaves ravagées. Après ça, les cités n'engagent plus d'excursions.

- An 163 : Coup d’Etat des Von Schatten - Dirigée jusqu’ici par quelques grands stratèges, la cité de Fiéroc subit un coup d’état soudain et impossible à arrêter de la part des Von Schatten qui se hissent sur le trône avec l’appui de tous les généraux et l’armée. Prise au piège, l’alliance des stratèges est dissoute et le régime impérial se met en place.

- An 238 : Création du Lac Eole - Tout le monde se souviendra du mois de Mars 238 car de puissants demi-dieux ont décidé de se combattre. Eole, dirigeant de la guide des érudits, fils de Pytia, et Brïa, directeur de la grande bibliothèque, fils de Runan ont confronté leurs visions opposées de la magie et de la recherche dans un ultime combat qui pourfendit la terre et la creusa d’un trou immense. Le corps d’Eole fut le seul retrouvé, inerte, celui de Brïa ayant totalement disparu. Le lac se remplit d’eau jusqu’à devenir ce grand lac naturel et les éclats de puissances formèrent les rivières qui l'alimentèrent.

- An 348 - 354 : Crise de l’or - Une grève générale des monnayeurs de la guilde des artisans qui se considèrent trop peu considérés et provoquent ainsi une crise économique sans précédent. Le cours de l’or explose, réglé généralement par édits, les façonneurs d’or sont les seuls à frapper la monnaie des sceaux officiels, doublés d’une protection de façonnage. Le troc redevient une valeur d’échange, ce qui amène chaque région à surconsommer ce qu’elle produit et créer des épidémies et famines pendant plusieurs années, causant la mort de nombreuses personnes jusqu’à l’édit de Groétham, qui reconsidère la monnaie, les salaires et l’impact de l'étalonnage par rapport à l’or.

Aujourd’hui, chacun a les yeux tournés vers les frontières. Depuis l’an 383, les paysans et éclaireurs des frontières de chaque cité-état rapportent des mouvements étranges, des formes qui se déplacent dans l’ombre, des bruits menaçants. Au début, cela n’est que superstition, les témoins sont traités de fous. Puis, en 385, les premiers habitants disparaissent, les dépouilles sont retrouvées défigurées, tout le monde sait qu’aucun animal n’est capable de tels massacres. On renforce les frontières, on fait des recherches, on observe les corps. Au large des côtes, certains navires de pêcheurs sont portés disparus et lorsque la marée haute arrive, des carcasses de navires jonchent les plages. Chacun est inquiet, les cités commencent à s’accuser mutuellement de ce qui arrive. En cette année 388, une menace plane sur Oroste, l’extérieur s’éveille, silencieux, discret et terrifiant.